Très rapidement trouvée, ma réponse a été positive.
En effet, Augusto Guillermo Bayol, médecin dermatologue de formation et Sénateur National de la province de Santa Fé, né le 02/04/1906 à Pigüé est le fils de Auguste Victor Bayol (né le 21/05/1883 à Colombiès, Limayrac) et de Agustina Canutó (d’origine espagnole), couple marié le 03/06/1905 à Pigüé.
Auguste Victor lui-même est le fils de Auguste Joseph Bayol (né le 02/09/1851 à Druelle) et de Valérie Marie Boutonnet (née le 27/08/1855 à Moyrazès, La Selve); couple marié le 28/01/1880 à Moyrazès et qui arrive en Argentine le 15/04/1890 avec deux enfants: Auguste Victor et Rosalie Valérie, dite Palmyre.
Pendant que j’effectuais mes recherches, Alain a retrouvé à Corrientes les petits-fils du Sénateur et avec lesquels il correspond désormais.
Cette requête satisfaite, tout aurait pu s’arrêter là mais des documents que j’avais archivés m’ont permis de prolonger l’étude.
Un document de la Revue du Rouergue et de plus et en dépit de quelques erreurs, des articles du journal la Dépêche du Midi révèlent une bien touchante histoire de famille et un fort intéressant récit liant l’Aveyron à Pigüé.
Première partie. Une touchante histoire familiale
Le Sénateur Augusto Guillermo Bayol éprouve une grande affection pour Monsieur Pierre Léopold Garrigues qui s'est occupé de lui dans sa jeunesse. Pierre Léopold né le 01/03/1888 à Onet-Le-Château a émigré à Pigüé en 1906; célibataire, il est le cousin germain du père d’Augusto Guillermo.
Suite à un voyage diplomatique, le Sénateur a retrouvé à Rodez Louise Marie Valérie Garrigues, épouse Masson, la sœur (demi-sœur) de Léopold Garrigues et lui fait la promesse de revenir avec ce dernier, un remerciement dévoilé à l’égard de Léopold qui considérait «Augusto Guillermo Bayol comme son fils»!
Promesse tenue en cette année 1960. C'est ainsi que quelques six mois plus tard, Augusto Guillermo Bayol accompagné de son épouse, de son fils et de Léopold Garrigues alors âgé de 72 ans arrivent à Rodez. Après 54 ans d’absence, Léopold retrouve sa sœur Mme Masson et toute la famille. Vingt jours pour savourer les émouvantes retrouvailles familiales et revoir la terre aveyronnaise qui l’a vu naître.
Une promenade à Rodez mérite d’être contée tant elle est originale. Léopold Garrigues passant sur le Boulevard Gambetta demande à sa famille que l’on arrête la voiture. Il veut voir le célèbre grand magasin ruthénois «Les Dames de France», ex «Bazar La Ménagère», aujourd’hui Monoprix. Avec attention, il scrute les consoles métalliques qui soutiennent la verrière extérieure. Car, surprise, c’est lui qui les a placées là; ce fut son dernier travail avant son départ en Argentine! Travail de ferronnerie réalisé par l’entreprise Martin de Rodez.
Hélas, les journaux du 03/05/1960, font part d’une bien triste nouvelle. Cinq jours après son arrivée, Léopold Garrigues décède le 29/04/1960 à Rodez, 5 rue Sadi-Carnot, des suites d’une opération urgente. Une coïncidence: le premier docteur qui était venu à son chevet n’est autre que le Docteur Cabanettes, le neveu de Clément Cabanettes, cofondateur de Pigüé. Imaginez combien la consternation et la douleur sont grandes. Léopold repose désormais en paix dans une tombe de famille du cimetière d’Olemps, La Mouline.
Deuxième partie. Un récit se doit d’être conté ici faisant que conforter une fois de plus les attaches toujours vibrantes entre l’Aveyron et Pigüé.
Avant de repartir, accompagné de Monsieur Bertrand de Lapanouse, Maire de Rodez, le Sénateur Bayol prélève un peu de terre aveyronnaise au jardin du foirail avenue Victor Hugo à Rodez. Elle est placée dans un coffret dont fait don le groupe folklorique «La Pastourelle». Si ce geste s’est déroulé de façon assez confidentielle en France, il va donner lieu à une fête à Pigüé conjointement aux festivités du 76ème anniversaire de la fondation.
Là-bas, «les actes officiels commencèrent dès 9 h du matin où se regroupèrent sur la Plaza San Martin les autorités municipales provinciales, militaires, religieuses et policières». A l’église Nuestra Señora de Luján ont pu entendre un solennel Te Deum. Après la cérémonie religieuse, les enfants des écoles et la foule se regroupèrent devant la statue de Cabanettes, avenida Casey.
Après une minute de silence, Messieurs le Docteur Enrique Meiller, Président du Comité des Fêtes, et Augusto Guillermo Bayol, Sénateur, dévoilèrent le précieux coffret de terre aveyronnaise afin de le déposer dans le piédestal de la statue. S'en suivent les discours.
Du chaleureux discours de M Meiller, on peut évoquer «Une circonstance spéciale marque les fêtes anniversaires de cette année, grâce à l'arrivée et à l'agréable présence de M le Sénateur Bayol qui a apporté de la terre de Rodez exposée là devant nous au pied du monument de Cabanettes notre fondateur».
«Cette terre symbolise l'amitié franco-argentine et elle nous rappelle toute la reconnaissance et tous les éloges que nous devons à ces honnêtes et vaillants pionniers de l'Aveyron, hommes et femmes qui travaillèrent ici avec un outillage rudimentaire mais avec une ardeur et une foi sans bornes, pour ouvrir et préparer la moisson dont nous recueillons maintenant tous les fruits».
M Oliver, l'Intendant provincial félicita et remercia M Bayol pour son magnifique geste. Citons cet extrait: «Avides de progrès, frappées par la similitude des terres, des montagnes, du climat entre ce pays nouveau et celui qu'ils venaient de quitter, ces familles comprirent bien vite qu'elles avaient trouvé ici une seconde patrie destinée à être plus tard l'unique patrie de leurs enfants».
Quant à M Bayol, il se livra à une brillante et et émouvante allocution à la gloire des fondateurs, des pionniers aveyronnais et de la généreuse terre de Pigüé. «Aquellos primeros pobladores, que aquí levantaron sus hogares y criaron a sus hijos y que en las mañanas de sol, dialogaban cordialmente, recordando su lejana patria, pero sin olvidar el querido Pigüé que le había brindado las bondades de sus tierras y su clima». Ensuite, le Docteur Bayol, se référant à sa jeunesse, évoqua le bon temps vécu avec les Pigüenses et adressa des louanges appuyées aux Frères des Ecoles Chrétiennes du collège La Sagrada Familia dont il fut élève. Pour terminer, il a tenu à préciser que c'est M Eugenio Monferran qui lui avait suggéré de rapporter de la terre aveyronnaise
Après avoir applaudi les trois intervenants, la foule put entendre l'hymne national argentin et assister au défilé militaire suivi de celui offert par le Centro Criollo de Pigüé. A noter que quelques cavaliers de Coronel Suarez se joignirent spontanément aux défilés des fêtes du 76ème anniversaire de la fondation de Pigüé.
Tout ceci se passait en 1960 ! Ces liens perdurent toujours aujourd’hui et avec autant de force et d’enthousiasme à l’occasion de diverses manifestations comme les fêtes anniversaires de la fondation, la fête de l’Omelette, la fête de l’Aligot, le mois de la France en Juillet et toute occasion opportune selon les événements qui se présentent.
Aujourd’hui en 2021! Vive l’Aveyron! Vive Pigüé !
Eliane Albouy
Sources
Je remercie très chaleureusement les personnes qui m'ont aidées à étoffer ce témoignage